Des chercheurs identifient pour la première fois des neurones du cortex visuel répondant aux visages

Recherche Mis en ligne le 23 janvier 2019
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Une nouvelle étude, publiée dans la prestigieuse revue Neurology, identifie pour la première fois des neurones du cortex visuel humain répondant de manière sélective aux visages. Cette étude a été conduite par le Dr. Vadim Axelrod, responsable du laboratoire Conscience et Cognition du Gonda (Goldschmied) Multidisciplinary Brain Research Center de l’Université Bar-Ilan (Israël), en collaboration avec l’équipe de Lionel Naccache (Sorbonne Université-APHP) à l’Institut du Cerveau et de la Moelle Épinière et à l’Hôpital de la Pitié-Salpêtrière.

 

Imaginez un monde où tout le monde a le même visage. Il serait effectivement très différent de celui que nous connaissons. Dans notre monde, où chacun est différent, notre visage véhicule des informations essentielles. La plupart d’entre nous reconnaissent par exemple le visage d’une célébrité même s’il n’apparait qu’une fraction de seconde, ou bien la tête d’un ancien camarade de classe, malgré des années sans se voir. Nous pouvons interpréter l’humeur d’autrui juste par ses expressions faciales. Nous pouvons également deviner si une personne est digne de confiance en observant simplement son visage. Malgré des recherches intenses dans ce domaine, un mystère perdure : comment notre cerveau contrôle-t-il ces comportements ?

 

 « Au début des années 1970, le professeur Charles Gross et ses collègues ont découvert des neurones dans le cortex visuel des macaques qui répondaient aux visages. Chez l’être humain, une telle activité a été particulièrement recherchée, principalement par IRM fonctionnelle et électroencéphalographie, sans succès jusqu’à présent. » explique Vadim Axelrod, premier auteur de l’étude. « Dans notre étude, nous avons eu l’opportunité rare d’enregistrer l’activité des neurones grâce à des microélectrodes implantées au cœur de l’aire fusiforme des visages, la plus grande et probablement la plus importante région spécifique des visages du cerveau humain. »

 

Les chercheurs montrent que des neurones du cortex visuel, au cœur de l’aire fusiforme des visages, répondent beaucoup plus fortement aux visages qu’à des paysages ou des objets (voir exemples : https://youtu.be/QYJCB60FhHE). Une réponse importante est détectée aussi bien pour des visages de célébrités (e.g., Charles Aznavour, Nicolas Sarkozy, Catherine Deneuve, Louis De Funes) que d’inconnus. Une expérience supplémentaire met également en évidence une sélectivité de ces neurones pour les visages humains et d’animaux apparaissant dans un film (un clip du Cirque de Charlie Chaplin).

Les neurones les plus connus pour la reconnaissance des visages sont probablement les “cellules Jennifer Aniston”, des neurones du lobe temporal médian répondant à différentes images d’une personne en particulier (l’actrice Jennifer Aniston dans l’étude originale publié dans la revue Nature par Quiroga et ses collègues en 2005).

 

« Les neurones du cortex visuel que nous venons d’identifier sont très différents de ceux du lobe temporal médian » précise Vadim Axelrod. « Tout d’abord, ils répondent vigoureusement à n’importe quel type de visage, quel que soit l’identité de la personne. Deuxièmement, ils répondent beaucoup plus tôt. Plus spécifiquement, une réponse était observée dans les 150 millisecondes après avoir montré l’image contre plus de 300 millisecondes pour les cellules « Jennifer Aniston » ».

 

 

Ces résultats fournissent des informations uniques sur le fonctionnement de notre cerveau à l’échelle cellulaire au cours du traitement des visages. Ils permettent également d’établir un pont entre les mécanismes de reconnaissance des visages au sein de différentes espèces.

 

« Nous sommes très enthousiastes d’avoir pu montrer, presque 50 ans après la découverte des neurones spécifiques des visages chez le macaque, des neurones similaires chez l’être humain. » conclu Vadim Axelrod.

 

Texte original en anglais écrit par le Dr. Vadim Axelrod :https://www.eurekalert.org/pub_releases/2019-01/bu-rin011519.php

 

Source

http://n.neurology.org/content/92/4/197.full