Découverte d’un nouveau gène responsable de dégénérescence fronto-temporale

Recherche Mis en ligne le 19 juin 2018
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Une étude conduite par les équipes d’Isabelle Le Ber et Charles Duyckaerts a permis d’identifier un nouveau gène impliqué dans les dégénérescence fronto-temporale. Cette découverte constitue une avancée pour le diagnostic de ces pathologies et pour le conseil génétique aux familles des patients.

Les dégénérescences fronto-temporales (DFT) sont dues à une perte de neurones et une atrophie dans les régions frontales et temporales du cerveau. Dans 15% des cas, elles sont accompagnées d’une atteinte du motoneurone qui se traduit par une sclérose latérale amyotrophique (SLA). La SLA et la DFT sont des pathologies qui forment donc un continuum clinique mais également moléculaire puisque toutes les deux peuvent être liées à l’accumulation anormale dans les neurones d’une protéine nommée TDP43 (ou protéinopathie TDP-43). Plus rarement, les DFT sont associées à des lésions neuronales constituées de protéine TAU ou de protéine FUS. Environ 40% des patients atteints de DFT ont une histoire familiale de la maladie évoquant une cause génétique. A ce jour, plus de 20 gènes sont impliqués dans les formes familiales de DFT, mais une partie des formes familiales (environ 15%) restent encore inexpliquées.

Les chercheurs de l’Institut du Cerveau – ICM ont conduit une étude sur des cerveaux de patients atteints de DFT avec une protéinopathie TDP-43, exclues pour toutes les causes génétiques connues, et ont identifié une mutation du gène de l’ataxin2. Ce gène était préalablement connu comme impliqué dans certaines formes familiales d’ataxie spinocérébelleuse de type 2 (SCA2), une maladie neurodégénérative affectant le cervelet et se manifestant principalement par des troubles de la marche, de l’équilibre et de la coordination. La mutation du gène de l’ataxin2 est caractérisée par une répétition anormale d’une séquence ADN de trois nucléotides « CAG ». Chez le sujet sain, ce motif de trois nucléotides est répété moins de 26 fois. Un nombre de répétition supérieur à 34 CAG devient pathologique et entraine une ataxie spinocérébelleuse de type 2. Entre 26 et 34 répétitions, aussi appelée zone intermédiaire, elle constitue un facteur de risque de la SLA.

Les chercheurs mettent en évidence un nombre anormal de répétitions CAG dans le cerveau d’une patiente atteint de DFT associée à une protéinopathie TDP43. La particularité de cette expansion est qu’elle est interrompue par des motifs CAA, contrairement aux expansions responsables d’ataxie spinocérébelleuse. L’étude neuropathologique montre que le cervelet est complètement préservé contrairement à ce qui est observé chez les patients SCA2, et met également en évidence certaines caractéristiques neuropathologiques propres à cette forme interrompue de répétitions CAG.

La présente étude a donc permis d’identifier une nouvelle cause génétique de DFT, qui représente une avancée importante pour le diagnostic des DFT et le conseil génétique aux familles. Le gène ataxin2 pourra être testé chez les patients pour lesquels on suspecte une DFT lorsque les gènes les plus fréquents sont exclus.

L’étude sur les cerveaux de patients DFT a été rendue possible grâce à une collaboration avec le réseau de neuropathologistes NeuroCEB, coordonné par le Pr C. Duyckaerts, et la banque de cerveaux Biobanc-Hospital Clinic-IDIBAPS de Barcelone coordonnée par le Dr E. Gelpi.

Référence : Interrupted CAG expansions in ATXN2 gene expand the genetic spectrum of frontotemporal dementias. Fournier et al. Acta Neuropathologica Communications. June 2018