Une exploration à grande échelle des formes génétiques de la maladie de Parkinson

Recherche Mis en ligne le 6 juillet 2020
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Une étude conduite par Suzanne Lesage et Alexis Brice à l’Institut du Cerveau sur une cohorte de plus de 1600 patients, apporte de nouvelles perspectives sur certaines formes génétiques de la maladie de Parkinson.

 

Si la caractéristique principale de la maladie de Parkinson est la dégénérescence des neurones spécifiques dans le cerveau, les neurones dopaminergiques, les causes de cette maladie et les formes qu’elle peut prendre sont extrêmement diverses. Parmi elles, les formes génétiques, causées par la mutation d’un ou plusieurs gènes, représentent non seulement un potentiel important pour explorer certains mécanismes de la maladie, mais aussi un espoir à l’heure où de nouvelles thérapies ciblées sont à l’essai.

 

Depuis 1990, une grande cohorte sur la maladie de Parkinson, mise en place par le Professeur Alexis Brice, a été constituée dans le cadre d’un réseau national et international coordonné par l’Institut du Cerveau à l’hôpital Pitié-Salpêtrière. Les patients inclus participent à une analyse génétique ainsi qu’une évaluation clinique. Au sein de cette cohorte, Suzanne Lesage et ses collaborateurs ont recherché, chez plus de 1600 individus, des anomalies dans trois gènes, PRKN (Parkin), PINK1 et DJ-1, dont les mutations sont la cause la plus fréquente des formes génétiques récessives (nldr : les deux copies du gène doivent être mutées pour que la maladie se développe, chaque copie étant héritée d’un de leur parent non-malade) de la maladie de Parkinson à début précoce, avant 40 ans.

 

D’un point de vue épidémiologique, dans cette cohorte de patients avec un âge de début assez précoce, 14,1 % des patients présentaient une mutation dans l’un de ces gènes. Le gène PRKN est de loin le plus fréquemment muté dans les populations caucasiennes, par rapport à PINK1 et DJ-1, affectant ainsi 44% des cas familiaux avec un âge de début de la maladie avant 40 ans mais au-delà de 60 ans, ces mutations sont extrêmement rares, voire absentes. En revanche, dans les populations d’Afrique du Nord, ce sont les mutations dans PINK1 qui représentent la cause principale de maladie de Parkinson génétique.

 

Ces différentes mutations ont également un impact sur la présentation clinique de la maladie. Les patients porteurs d’une mutation de la PRKN déclarent les symptômes plus précocement mais avec une progression moins sévère que chez les patients non-porteurs de mutations. C’est le cas en particulier de la démence survenant à un stade avancé de la maladie et de la dysautonomie – le dysfonctionnement du certaines fonctions végétatives comme la pression artérielle ou les troubles urinaires.

 

L’évolution de la maladie est aussi plus lente et après ajustement sur la durée de la maladie, les patients avec des mutations délétères dans PRKN développent moins de complications motrices consécutives au traitement de référence, la L-Dopa, comme les dyskinésies, les fluctuations motrices et les dystonies, par rapport à ceux sans mutations.

 

L’ensemble de ces résultats va bénéficier à plusieurs niveaux de la prise en charge de la maladie de Parkinson. Pour certains choix de traitement par exemple, comme recourir à la stimulation cérébrale profonde. Les patients porteurs d’une mutation présentent une forme moins grave, avec peu de signes de démence, moins de complications motrices dû au traitement de longue durée par L-Dopa. Ils sont donc de bons candidats à ce type de thérapies.

 

Ces résultats fournissent également de précieuses informations pour guider l’analyse et le conseil génétique chez les patients nouvellement diagnostiqués et dans leur famille. Ils permettront également de stratifier les patients dans des cohortes, en vue de futurs essais cliniques ciblés sur les déficits associés aux mutations de PRKN et PINK1, et plus généralement pour suivre l’évolution de leurs symptômes.

 

Cette étude constitue donc une première étape vers une prise en charge plus personnalisée des patients atteints de ces formes de maladie de Parkinson.

 

Source 

Characterization of recessive Parkinson’s disease in a large multicenter study. Lesage S, et al. Ann Neurol. 2020 May 30.

 

 

 

 

 

Equipes scientifiques

Equipe "Physiopathologie moléculaire de la maladie de Parkinson"
Chef d'équipe
Olga CORTI Directeur de Recherche, Inserm, Institut du Cerveau
Jean-Christophe CORVOL MD, PhD, PU-PH, Sorbonne Université, AP-HP
Physiopathologie des maladies neurologiques Domaine principal : Neuroscience moléculaire & cellulaire Domaine secondaire : neuroscience clinique & translationnelle L’équipe "Physiopathologie moléculaire de la maladie de Parkinson", dirigée par Olga CORTI & Jean-Christophe CORVOL, s’intéresse à la complexité de la maladie de Parkinson et mène des projets de recherche pluridisciplinaire associant l’évaluation clinique, la biologie des neurones et la génétique.
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