Impact des facteurs génétiques sur l’âge de début des symptômes dans des formes familiales de DFT

Recherche Mis en ligne le 23 janvier 2018
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Des chercheurs et cliniciens de l’Institut du Cerveau – ICM et de l’APHP montrent, pour la première fois, l’influence de la génétique au sens large dans l’âge d’apparition de la maladie de certaines formes familiales de dégénérescences fronto-temporales. L’identification précise des facteurs génétiques devrait, à terme, permettre de mieux prédire l’âge de début de la maladie chez une personne à risque ce qui aura un impact direct pour le conseil génétique et la prise en charge des patients.

Les dégénérescences fronto-temporales (DFT) sont dues à une perte de neurones et une atrophie dans les régions frontales et temporales du cerveau. Elles se caractérisent par des troubles du comportement et/ou du langage et dans 15% des cas également par une atteinte du motoneurone qui se traduit par une sclérose latérale amyotrophique (SLA). Il s’agit de la 2e cause de démences précoces (avant 65 ans), après la maladie d’Alzheimer, avec environ 6 à 10 000 personnes atteintes en France.

Dans environ 40% des cas de DFT, une histoire familiale de la maladie est présente. Parmi les gènes plus fréquemment impliqués, on retrouve les gènes C9ORF72 et GRN. Dans ces formes génétiques, le tableau clinique de la maladie est très variable d’un patient à l’autre et notamment en ce qui concerne l’âge d’apparition de la maladie. Les premiers symptômes peuvent apparaître aussi bien dès 30 ans qu’à un âge très avancé (>75 ans) selon les individus porteurs d’une même mutation. Mais l’origine de cette variabilité reste encore inconnue, impactant le conseil génétique et la mise en place d’essais thérapeutiques notamment.

Dans d’une étude réunissant 504 patients, issus de 133 familles avec des mutations de C9ORF72 et 90 familles avec des mutations de GRN, Mathieu Barbier (APHP, Institut du Cerveau – ICM) et Isabelle Le Ber (APHP, Institut du Cerveau – ICM) ont croisé l’âge de début de la maladie avec la structure familiale, c’est-à-dire les relations entre les individus au sein des familles afin d’estimer le poids des facteurs génétiques ou héritabilité et observer les corrélations intrafamiliales.

« Notre objectif était d’évaluer la contribution des facteurs génétiques additionnels à la mutation responsable de la maladie sur l’âge d’apparition de la maladie. »

Les chercheurs ont ainsi pu montrer que, dans leur cohorte, la variabilité totale de l’âge de début des symptômes pouvait être expliquée à plus de 50% par les facteurs génétiques présents au sein des familles porteuses d’anomalies dans le gène C9ORF72, et dans une moindre mesure dans les familles avec mutations de GRN. Ils ont également étudié les différences de profils de corrélations intrafamiliales, entre frères et sœurs, parents et enfants.

« Ces différences suggèrent des facteurs génétiques plus influents qui seraient situés sur le chromosome X. »

Cette étude est l’une des rares se basant sur une approche familiale. Elle a été rendue possible grâce au centre national de référence des démences rares ou précoces coordonné par Isabelle Le Ber et dirigé par le Pr Bruno Dubois, et grâce au réseau national de recherche sur les DFT et DFT/SLA, qui ont permis d’obtenir des informations cliniques détaillées sur les patients et apparentés de familles DFT/SLA.

« Cette première étape souligne l’importance d’observer ce qui se passe dans les familles pour estimer le poids de la génétique dans l’évolution de la maladie et emmètre de nouvelles hypothèses. Grâce à l’identification précise de ces facteurs génétiques sur laquelle nous travaillons actuellement, il devrait être possible d’identifier des cibles biologiques pour retarder l’apparition de la maladie et mieux prédire l’apparition des symptômes. Cela aura un impact direct sur le conseil génétique, la prise en charge du patient et la mise en place d’essais cliniques et thérapeutiques. » Isabelle Le Ber (APHP, Institut du Cerveau – ICM) et Mathieu Barbier (APHP, Institut du Cerveau – ICM).

 

Référence : Factors influencing the age at onset in familial frontotemporal lobar dementia: Important weight of genetics. Barbier M, Camuzat A, Houot M, Clot F, Caroppo P, Fournier C, Rinaldi D, Pasquier F, Hannequin D, Pariente J, Larcher K; French Clinical and Genetic Research Network on FTD/FTD-ALS*; Predict-PGRN & PrevDemAls Study Groups†, Brice A, Génin E, Sabbagh A, Le Ber I. Neurol Genet. 2017 Dec 13.